



13. Kerbouche Ali, Bourdine Moussa, Oulhaci Mohamed, Nadjar Mohamed, Bouarour Said, Ould Aîssa Ali, Filali Mustapha, Tadjer Mustapha, Bendaoud Youcef, Chaîb Salah, Ziraoui El Hadi, Ould Aîssa Raouf.
15. terme utilisé en Afrique de l’Ouest pour désigner les personnes blanches.
MENIA, Amina, ENCLOSED. Landowski, Issiakhem et moi, 2014
16 x 22 cm, 48 pages
Enclosed, adj. : joint, ci-joint, clos.
C’est Anaïs Marion[12] qui me l’a prêté. J’ai pu consulter chez elle ce livre, le ramener chez moi, lui rendre. J’ai pu le lire assise, debout, allongée.
1830 : Prise d’Alger par le royaume de France. Début de la période dite de l’Algérie coloniale.
1928 : Sélectionné lors d’un concours organisé par la municipalité de la ville d’Alger, Paul Landowski, sculpteur polonais, inaugure un monument aux morts dit « Le Pavois ».
1962 : Indépendance de l’Algérie. Il est question de détruire le monument au morts car il représente pour les Algériens un symbole de la colonisation française.
1978 : Jeux Africains, cinquante ans après l’achèvement de la sculpture de Landowski. M’Hamed Issiakhem, peintre algérien, mobilise des collaborateurs[13] et construit un coffrage en béton autour du Pavois afin de le protéger. Il est orné de deux poings émergents en train de se libérer de chaînes.
2012 : Cinquantenaire de l’indépendance. Amina Menia, artiste algérienne, commence son travail de recherche autour des monuments d’Alger. Le coffrage de M’Hamed Issiakhem est en train de se fissurer entre les deux poings.
Enclosed sort à l’issue d’un exposition puis d’une performance autour de ce monument. Cette publication regroupe une partie du journal de Paul Landowski, du carnet de bord d’Amina Menia, d’un entretien avec un artiste ayant travaillé avec M’Hamed Issiakhem, ainsi que quelques documents iconographiques, ce en français, et en anglais.
Ce sont des écrits à la première personne. Il me semble important de souligner cela : qui que soient ces acteurs, quel que soit leur statut ou leur actes, ce sont des êtres empreints d’individualité qui s’expriment, même s’ils écrivent l’histoire.
Ainsi, en passant par les expériences individuelles, celles d’artistes, celle d’Algériens, et la sienne, Amina Menia confronte la mémoire individuelle à la mémoire collective. Au contraire de ses autres productions liées à ces recherches, ce livre est un dispositif intime, doux, qui passe par des récits autobiographiques et des expériences personnelles, pour parler de la grande histoire, celle qui transite par le patrimoine et les monuments.
Que fait-on des monuments qu’on ne sait plus voir ? Je pense à Anaïs qui cherche partout Lénine et qui lorsqu’elle le croise parfois ne sait que lui dire[14]. Je pense à cette statue gigantesque, peinte en or, de Mao Zedong, construite dans le village de Henan en Chine, détruite presque immédiatement après. Je pense aux choses qu’on détruit parce qu’elles nous rappellent ce que nous avons été. Je pense à ce que l’on cherche à oublier.
La dualité qui traverse cette publication me renvoie à toutes celles qui me parcourent. Je me rappelle cette jeune femme à Dakar à qui je n’ai su que répondre : Chinois, Coréens, Japonais... Vous êtes tous les mêmes, je ne vois pas la différence, de toutes façons vous êtes comme les toubabs[15].
Qu’aurais-je pu lui dire, moi qui suis née et éduquée sur les terres de l’ancien colon, et pourtant toujours étrangère partout où je vais ? Histoire et les histoires se complexifient, et ne restent, pour comprendre – to understand dirait Anaïs – que les images et la pierre.
Dans la couverture couleur parme, marbre mort, est gaufrée l’empreinte du coffrage de Issiakhem.
Il est difficile de retrouver les références de cette publication. Le colophon indique qu’elle a été imprimée par la Royal Hibernian Academy, revue et rééditée par la Sharjah Art Fondation lors de la onzième Sharjah Biennale.
On peut par contre la retrouver intégralement numérisée et téléchargeable sur fliphtml5[16].
12. Étudiante de l’EESI.